Moyen-Âge – La folie des épices

 

Les premiers livres de cuisine sont quasiment tous anonymes. L’auteur ne cherche pas à devenir célèbre, il crée un instrument de travail, un aide-mémoire. Ils sont en général brefs, peu ordonnés et peu explicites, sans indication de temps de cuisson ou de proportion des ingrédients. Mais le recours à l’écrit marque un changement de statut pour le cuisinier en le sortant du monde des techniques manuelles.

 

Les premiers auteurs sont des cuisiniers des grandes cours, comme Guillaume Tirel, dit Taillevent. Premier chef à avoir laissé son nom dans l’histoire de la cuisine française, il est surnommé Taillevent, peut-être en raison de sa suractivité en tant qu’enfant de cuisine. Entré en 1326 dans les cuisines royales, il passe ses 70 ans de carrière au service de trois rois Valois (Philippe VI, Charles V et Charles VI). Le Viandier connaît un grand succès et est recopié et imprimé jusqu’en 1615, bien après la mort de son auteur.

 

Le viandier, Guillaume Tirel dit Taillevent, U.1127 Rés.
Le viandier
Guillaume Tirel, dit Taillevent
U.1127 Rés.

 

Les recettes du Viandier font un usage intensif d’épices : poivre, gingembre, cannelle, clou de girofle ou encore safran. Une légende tenace veut que les épices servent à camoufler le mauvais goût des viandes à la fraîcheur douteuse. Or au Moyen Âge, les viandes et les poissons sont toujours servis frais. La folie des épices s’explique pour d’autres raisons : elles évoquent un ailleurs exotique et sont d’un coût très élevé. En consommer est non seulement une marque de supériorité, mais aussi une preuve de bon goût. De plus, la cuisine médiévale cherche à éblouir le regard par la diversité des couleurs. La dorure, la plus recherchée, est obtenue grâce au safran.

 

Safran
Safran
Flore médicale
François Pierre Chaumeton et Jean-Louis-Marie Poiret
Dessins d'Ernestine Panckoucke et Pierre-Jean-François Turpin
C.16092

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