Un artiste en formation
Diodore Rahoult est un artiste en devenir, riche de ses lectures, de sa formation dans les ateliers de Horace Mollard à Grenoble et de Léon Cogniet à Paris, des tableaux de maîtres qu'il étudie au musée de Grenoble, et de son voyage de 18 mois en Italie.
Inséparables depuis leur enfance, Diodore Rahoult et Henri Blanc-Fontaine sont indissociables. Ils sont représentés ici dans le même capuchon et le même caban. Diodore Rahoult décrit ainsi Henri Blanc Fontaine : « J’ai un ami avec qui je suis toujours », il « vient au dessin avec moi, depuis peu comme moi, est de mon âge, et c’est avec lui que je vais toujours me promener surtout. » (Journal, préface). La famille Blanc Fontaine constate elle aussi l’affection que Henri a pour Diodore : « Courir la campagne avec un album ou une toile de peinture est pour lui le bonheur suprême, surtout lorsqu’il est accompagné d’un camarade qui a les mêmes goûts que lui. » – Correspondance de famille (avril 1835, f° 178).
Issu d’une famille d’horlogers, Horace Mollard préfère le dessin. En octobre 1836, le journal Le Patriote des Alpes annonce l’ouverture de son atelier à Grenoble : « M. Horace Mollard prévient les jeunes gens qui se destinent à l’étude du dessin que son atelier sera ouvert le 2 novembre, rue Montorge, n°8. » Diodore Rahoult y débute sa formation artistique. Le poêle qui trône dans l’atelier ne semble pas avoir été beaucoup utilisé, car Rahoult dira dans son journal : « Ah ! Ah ! M. Mollard a mis son poêle qui a été rouge une seule fois en sa vie ; aussi je vais y peindre. » (Journal, 8 novembre 1837). Mais ce dessin peut aussi vraisemblablement représenter l’atelier de Léon Cogniet à Paris, où se rend Diodore Rahoult en 1842, compte tenu du nombre important d’élèves.
Diodore Rahoult et Henri Blanc Fontaine aiment tous deux lire et raconter des histoires. Ils ont l’idée de faire un album à quatre mains. Ils alternent les aquarelles en couleurs racontant la vie d’un chevalier, et les dessins au fusain rappelant leurs escapades avec la famille Gamel à La Plaine. Ce dessin, réalisé par Diodore Rahoult entre les 15 et 16 novembre 1837 selon son Journal, est le premier de l’album, le frontispice étant l’œuvre de Henri Blanc Fontaine. Une fois achevé, l’album sera offert aux demoiselles Gamel.
Dans ce récit inachevé, Diodore Rahoult décrit les aventures de trois jeunes gens, « tous trois amateurs de peinture sans être cependant artistes ». Le récit débute par une scène dans un atelier, qui ressemble fort à celui qu’il partage avec ses camarades artistes Henri Blanc Fontaine et Auguste Perrotin : « Voyez entre les tableaux de nos artistes, voyez ces beaux portraits antiques qui le décore[sic] si bien, ces saintes familles, ces brigands, ces marines, et puis ces plâtres, ces apollons, ces dianes etc. Maintenant dans le fond, voyez au pied de cette belle armure de quatre ou cinq siècles, ces fragments d’armes, ces casques, ces épées, ces lances, ces hallebardes. »
Diodore Rahoult a probablement réalisé le premier carnet de croquis lors de son voyage de retour de Paris à Grenoble, après avoir achevé sa formation parisienne dans l’atelier de Léon Cogniet. Il a ensuite réalisé un deuxième carnet de dessins plus aboutis à partir de ces croquis, recueil portant les initiales dorées C. T., ce qui semble indiquer qu’il était destiné à un particulier.
Au cours de son voyage en Italie de 1845 à 1847, Diodore Rahoult dessine une paysanne en costume traditionnel de Saracinesco, village montagnard de la région de Rome. Il raconte qu’elle « pose en filant son fuseau et en parlant toujours ». Certaines villageoises quittaient les montagnes en hiver, quand il y avait moins de travail dans les champs, pour servir de modèles aux artistes à Rome. Diodore Rahoult décrit également les Romaines à son ami Faure Durif : « Si vous voulez admirer les belles gorges des Romaines, n’y allez pas quand le soleil se couche parce qu’elles sont empaquetées comme une momie et qu’on leur voit à peine les yeux. »